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La vie dans mon quartier de lune
8 décembre 2011

Batman à Bercy

batmanL’autre jour, dans le métro, une affiche a retenu mon attention. On connaît tous cette minute d’oisiveté et d’ennui profond, quand, le métro arrêté dans une station, on évite soigneusement le regard des gens qui descendent, puis celui des gens qui montent, qu’on compte les stations qu’il reste avant d’arriver à destination (encore 6 arrêts) et que les yeux finissent par se perdre sur les murs de la station Réaumur-Sébastopol. Le mur en question est toujours couvert d’affiches diverses, vantant des spectacles, des montres, des soldes, des promos vacances, et même, véridique, « le premier site de rencontres extra-conjugales pensé par des femmes ». Un jour comme un autre, donc, une affiche m’a tapé dans l’œil. « Batman à Bercy ». A première vue, l’affiche n’entre pas dans la catégorie montre, ni promos vacances (Bercy en été, c’est très surfait), et je ne crois pas que Bruce Wayne soit marié, donc jusqu’à preuve du contraire, difficile de parler de rencontre extra-conjugale. Si je suis ma propre logique, qui me paraît tout à fait recevable du fait même que j’en suis à l’origine, « Batman à Bercy » ne peut donc être qu’un spectacle. Et quel spectacle !

En plissant les yeux dans le but avoué d’en apprendre plus sur le contenu d’une telle promesse, je m’attarde sur l’illustration de l’affiche. Difficile de distinguer exactement ce qu’elle représente, la forme colorée néo-réaliste peut tout aussi bien s’interpréter comme un armadillo en plastique jaune que comme une toupie multicolore qui aurait fumé du cannabis. Abstraction faite de tout jugement personnel (et franchement, avec une affiche et une annonce comme celles-ci, j’ai du fournir un effort surhumain), il semblerait que l’on soit en présence d’un spectacle sur glace, genre de Holiday on Ice mais version chauve-souris, quand même. J’ai énormément d’imagination, mais Batman sur glace, je suis en déficit d’images mentales, je ne vous le cache pas. Déjà, imaginer Lorie sur des patins à glace, j’ai du mal, alors une chauve-souris géante en combinaison de latex, c’est limite malsain, je trouve. Les voitures à ultrasons qui vous parlent façon K2000, encore, passe. Le projecteur-spirographe qui lance des grands symboles dignes des Mangemorts d’Harry Potter dans la nuit, je veux bien. La cape fluide mais qui ne se prend toutefois jamais dans les portes automatiques des centres commerciaux et qui transformerait Batman en Isadora Duncan, la pilule passe avec difficulté, mais je suis tolérante, je ferme les yeux sur la cape. Mais les patins à glace, non, c’est pas possible. Je regrette. Batman sur des patins à glace ! Non mais et puis quoi ??? Superman avec son caddy à commissions, pendant qu’ils y sont. Certains mythes sont intouchables.

J’en étais là de mes contorsions sur mon strapontin de métro, imperméable au fait qu’un vide de plusieurs mètres commençait à se creuser autour de moi, comme si les gens m’évitaient, lorsque le métro a démarré. Non sans que je n’aie eu le temps de lire in extremis sur notre fameuse affiche : « avec des super méchants ! » Notez bien que des méchants ordinaires faisaient tomber le prix des billets d’entrée de moitié. Les organisateurs du spectacle ont donc du engager des super méchants. Alors là, je suis obligée de m’interroger : à quoi reconnaît-on un super méchant ? Quelle super caractéristique le distingue du banal méchant qui va se contenter de mettre Gotham à sac en balançant négligemment 3-4 personnes du haut d’un gratte-ciel de 77 étages ? L’examen approfondi de cette question m’a pris deux stations. Grâce à ma connaissance étendue de Batman, j’ai atteint une conclusion tout à fait acceptable : le grade d’un méchant dans Batman se définit par la dose de maquillage investie par les producteurs du film ou de la série. Un méchant normal ressemble au comptable qui rentre chez lui après sa journée de travail : costume sombre, chapeau de feutre noir, une vague mitraillette sous le bras, bref, rien de très différent de l’Inspecteur des Impôts classique (permettez que je règle mes comptes personnels au passage). Un méchant plus consistant sur l’échelle sociale présentera quelques caractéristiques farfelues, quelques notes qui tranchent avec l’ordre et le conformisme du méchant traditionnel : il portera des chaussettes à motifs Snoopy, ou bien aura les cheveux ébouriffés. Enfin, le vrai méchant, le super méchant se démarque par son excentricité totale, un grand foisonnement de couleurs et de matières, on sent que le maquilleur a joué à Frankenstein avec sa créature et qu’il a disposé d’un budget illimité côté pots de peinture. On se retrouve avec des personnages fantasques et costumés faut-voir-comme, coiffés avec un pétard, et encore plus mal maquillés que Céline Dion. Le Joker, Double-Face et le Pingouin entrent clairement dans cette catégorie (et on notera au passage que même mal maquillé, un pingouin reste tout de même plus attachant que Céline Dion. Et surtout, il chante mieux).

Cette affiche m’a occupée pendant tout le trajet jusqu’à Montparnasse et a fini par attiser ma curiosité, à tel point que la première chose que j’ai faite en rentrant chez moi a été de passer Batman à Bercy au gril Google. Premier constat : mon imagination a visiblement rajouté les patins à glace. Pas de Batman on Ice, ni sur gazon, ce sera sur terre battue ou rien. Deuxième constat : ça n’a pas l’air si mal, après tout, je me demande si ça ne vaudrait pas le coup d’aller voir ce que ça donne. Troisième constat : je me suis fait avoir comme une bleue et le gars qui a conçu l’affiche a parfaitement réussi son coup, parce que de l’incrédulité la plus totale, je suis passée à envisager d’aller voir le spectacle. Vive la pub.

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