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La vie dans mon quartier de lune
9 février 2012

L'âge de glace

Le grand sujet de discussion du moment, c’est le froid. Si, depuis une semaine que le thermomètre fait le poirier et affiche des températures aussi basses que le QI de Paris Hilton, vous n’avez pas une seule fois discuté de la nouvelle ère glaciaire que l’on traverse, et ça c’est la faute au réchauffement climatique, vous êtes un loser.

Comme je travaille chez moi, je n’ai pas été outre-mesure affectée par ce froid inhumain au moins deux fois par jour et j’ai pu me tapir dans ma tanière jusqu’à ce que la dernière boîte de crabe en conserve soit terminée. Je suis donc une demi-loseuse : j’ai limité les conversations météo avec mon prochain, et les quelques bribes que j’ai avancées timidement au grand monde sont vouées à rester des témoignages indirects d’un phénomène que je n’ai pas approché de près. Forte de cette constatation et parce que j’avais déjà loupé le défilé des Bleus sur les Champs-Elysées en 1998, j’ai décidé de ne pas laisser passer une nouvelle occasion de vivre un moment historique en direct : pas question de me trouver muette comme une carpe lorsque mes petits-enfants me demanderont plus tard : « Dis, Mamie, c’était comment, cet âge de glace, dans ta jeunesse ? C’est vrai que tu fabriquais des Mr Freeze avec tes cheveux ? C’est Papi qui l’a dit. » (Penser à faire une séance d’hypnôse et pousser cette scène futuriste jusqu’à l’apparition dudit Papi, pour voir si je le connais déjà).

Revenons à nos glaçons. Grande première, j’ai donc décidé de mettre le nez dehors aujourd’hui. Expérience tout à fait désarçonnante, si je puis me permettre.  Au début, le froid, j’ai trouvé ça drôle. Ca vous picote les joues, ça vous fait briller les yeux, moi qui rivalise d’ordinaire avec le Mime Marceau rapport à mon teint d’albâtre fâné, pour une fois je me découvre des couleurs de visage insoupçonnées, que même Heidi en aurait crevé d’envie, dans sa montagne.  Je ricane devant le mouvement de panique qui s’empare des deux Ceher Seniors, tandis qu’ils se barricadent du froid à grands coups de tapis anti-courants d’air et qu’ils font le serment de ne plus sortir tant que la température extérieure ne positivera pas comme Carrefour. Je me gausse, je  gambade dans la rue, tête nue, « ah ah ! Mais au soleil il fait doux ! Lâchez-moi avec votre bonnet, à la fin ! » et je frime autant que l’été lorsque l’eau est à 17 degrés et que je suis la seule à être trop fière pour reconnaître publiquement qu’à 17 degrés, la Méditerranée, c’est froid, on ne se baigne pas. Mon attitude de homard hâbleur tient à peu près dix minutes, au terme desquelles mon premier doigt gelé tombe. J’en rabats un peu.

Je rajuste mon anorak sur ma nuque en pestant parce que je n’ai pas pris mon bonnet. Le contact de l’anorak sur mes cheveux me transforme en Jamaïcaine albinos, mes cheveux (longs, toujours longs, l’hiver, c’est à retenir comme technique de survie en milieu polaire) s’envolent sous l’effet de l’électricité statique. Depuis une semaine que la France s’essaie à la mode arctique, mon entourage prend mes cheveux pour une activité de la Cité des Sciences. Je ne compte plus le nombre de personnes qui a fait mumuse avec ma tignasse en rigolant bêtement quand la tignasse en question réagit comme si je venais de mettre le doigt dans une prise électrique. Si le gars de la pub pour la Super Glue a besoin d’une doublure quand il est pendu par les pieds au plafond, je peux le remplacer sans effets spéciaux, côté cheveux. Pendant que mes amis s’émerveillent devant l’attraction ludique de la Cité des Sciences incarnée par mes cheveux, donc, je perds mon deuxième doigt gelé. Le froid commence à me courir sur le système, je décide que l’expérience est terminée et qu’il est temps de rentrer. En attendant sur le quai du métro aérien pendant le trajet de retour, je trifouille mon iPhone pour écouter de la musique. Je ne dois pas imiter correctement mon toucher habituel, parce que, sans mauvais jeu de mots, mon iPhone reste de glace. Le touchpad ne répond absolument pas à mes pressions désespérées sur mon écran, il reste aussi insensible que Bernadette Chirac face aux pièces blanches. J’en déduis que mes doigts ne produisent pas suffisamment de chaleur pour être reconnus par mon téléphone.  En gros, mon iPhone est en train de me dire que si j’étais coincée dans un vaisseau spatial et qu’une équipe de secours tentait de me localiser avec un détecteur de signe de vie, j’aurais le temps de me mettre en orbite autour de Saturne avant qu’on ne retrouve mon cadavre congelé transformé en Hibernatus, mais version mort, quand même. Ce qui me fait penser à cette citation de Michel Audiard : « quand on mettra les cons en orbite, t’as pas fini de tourner ». Je préfère ne pas établir de rapprochement entre ces deux dernières phrases. J’économise mes dernières forces pour lutter contre le froid.

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Commentaires
C
Et je note au passage une petite vengeance sur les Heidy de tous les pays! Nyark!<br /> <br /> Merci Ceher!
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