La Voleuse de Sommeil
La voleuse de sommeil est entrée sans frapper à la porte de ses rêves.
Elle a fureté dans la bibliothèque, elle a souri devant la photographie de son Inconscient et devant l’insouciance de sa photographie. Elle s’est avancée sur la pointe des pieds derrière le futur rêveur pour déposer un baiser dans son cou. Sans se méfier, il lui a ouvert ses bras et sa tendresse.
Alors, tout doucement, elle a commencé à tirer à elle le ruban de sommeil qu’il avait mal caché dans ses poches. Elle l’a déroulé tout le temps qu’il l’embrassait, il ne s’est rendu compte de rien. Il ne l’a pas vue enrouler ses heures de fatigue à lui autour de ses poignets à elle. Il s’est perdu dans ses caresses à dormir debout, il a cru au pouvoir hypnotique de l’alchimie, il a compté les moutons en forme de nuage soufflés par la cloud-making machine, il a surfé sur l’élégance de leur contact sans penser aux lendemains ni aux coqs qui chantent. Il n’a pas pensé à surveiller les heures qui défilent sur sa pendule lumineuse, il n’a pas vérifié dans ses poches les grains de sable du marchand.
Confiant, il a fermé les yeux.
Et comme Morphée le repoussait, il a fouillé sous son oreiller, sans y trouver la trace du sommeil qu’il y avait laissée le matin-même. Alors, il a compris et il a dit :
« Tu m’as volé mon sommeil ».
Photo (c) Parc Naturel Régional du Livradois-Forez- Tous Droits Réservés