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La vie dans mon quartier de lune
29 mars 2013

Vétérinaire

 

chat

 

Dans la vie, on traverse toutes sortes d’épreuves, mais s’il y en a bien une qui rend humble, c’est la visite chez le vétérinaire.

Le drame commence à H-20mn, quand il s’agit de mettre le chat dans le panier. La minute tragique à laquelle je m’aperçois que mon chat n’est pas un chat, mais l’homme-araignée. Je reconstitue la scène pour ceux qui ne visualisent pas bien, ou qui n’ont pas de chats élastiques : il y a quelques années, j’ai suivi les conseils de cette banque qui me recommande fortement d’investir pour l’avenir, et j’ai acheté un panier tout neuf à mon chat. Un truc en plastique grand format, avec deux options : entrée du chat par une petite porte grillagée sur le côté, ou par une trappe astucieusement placée sur le haut du panier. Le rituel est immuable : trente minutes avant le rendez-vous chez le véto, j’attends que Chat regarde ailleurs, et je sors le panier du fond du placard. J’attire Chat dans la chambre sous un prétexte quelconque, genre eh viens voir, une croquette géante a poussé sur le lit !, et sitôt  ma proie enfermée dans ma chambre avec moi, je bondis sauvagement pour l’attraper. Je me cogne au passage le pied contre le coin de ma bibliothèque, et pendant que je jure copieusement, Chat a visé le panier, avant de plonger sous le lit. « Ca se présente pas très bien », me dis-je avec réalisme. 20 minutes de manche à balai mouvant sous le lit pour déloger le félin qui s’y planque, je réussis enfin à attraper la bête.

A ce stade, je m’étonne que Fort-Boyard n’ait encore jamais imaginé d’épreuve consistant à trimballer à deux mains une pelote d’épingles à couture vibrante et tournoyante, je reste persuadée qu’elle contient un fort potentiel ludique si j’en crois les divers incidents qui égrènent mon parcours jusqu’au panier avec le chat pendouillant dans mes mains. La ligne d’arrivée est en vue, je tente un atterrissage par la porte latérale, que j’ai bien pris soin d’ouvrir auparavant, trois années d’études aéronautiques et de mains déchiquetées m’ont appris à an-ti-ci-per. Erreur. Chat est relativement intelligent et comprend relativement vite mon intention. Il adopte alors une position digne du Grand Yogi Cosmique, avec dos incliné  à 77 degrés vers l’arrière, pattes avant en mouvement crabe et pattes arrières en mode dit du freinage intempestif sur les talons. Je ne peux pas m’empêcher de constater une ressemblance troublante entre Chat et Michael Jackson dans Thriller.  Je me demande si Michael Jackson avait lui aussi une peur phobique du panier à véto, et je me ravise en pensant au caisson à oxygène dans lequel il avait élu domicile. La réponse est non.

Et de toute évidence, la porte latérale n’est pas la bonne option pour un chat en orientation verticale avec freins intégrés. Qu’à cela ne tienne, j’abats ma deuxième carte, celle de la trappe sur le haut du panier. Je rattrape Chat qui se transforme en caramel mou coulant pour plus de fun, et je le présente au-dessus du panier. Chez le vétérinaire, c’est lui qui s’en occupe et ça a toujours l’air très simple. Il n’y a pas de raison que ça ne soit pas très simple chez moi aussi. Je ne dispose cependant pas tout à fait de la même autorité que le véto, puisque je sens Chat se raidir à mesure que la trappe se rapproche. Ca se présente mal, il penche la tête, tant pis pour l’élégance de la chose, au moins la tête est passée, c’est en bonne voie. Que nenni. Poussé par l’énergie du désespoir, Chat se transforme alors en homme-araignée, v. plus haut, en accrochant lestement ses quatre pattes à chaque bord de la trappe. On dirait une chauve-souris planante, c’est du plus bel effet, sauf que le rendez-vous étant maintenant dans quinze minutes, mon intérêt pour les chauve-souris planantes se trouve tragiquement limité. Je décroche une à une les pattes de Chat, qui, bien entendu, les raccroche une à une aussi sec. De dépit, j’appuie sur son dos pour créer une sorte de pression qui, par un mécanisme physique, créerait un poids entraînant tout le corps à l’intérieur du panier. Je mise tout ce que j’ai sur la gravité terrestre, et je pousse. J’ai sous-estimé la souplesse de l’animal, plus j’appuie vers le bas, plus son dos rebondit haut. Je vais pleurer.

Découragée, je finis par dégainer l’arme ultime qui perd malheureusement en efficacité au fil des utilisations : la gamelle. Je feinte en la posant dans le panier, Chat est décontenancé, ce n’est pas l’heure de manger alors ça l’intrigue, et cette hésitation sera sa seule erreur. Je profite de cette fraction de seconde pour déverrouiller ses quatre pattes à la vitesse grand V, et le déposer au fond du panier en fermant la trappe bien vite. Il me jette le même regard que les animaux sur les prospectus de la SPA avec gros plan sur le blanc de l'oeil. Je regarde ailleurs, et j’empoigne le panier.

Chat a compris qu’il avait perdu une bataille, mais ne renonce pas. Dans la salle d’attente du vétérinaire, les chats des gens normaux attendent piteusement, blottis au fond de leur panier. Pas le mien. Chat n’est pas du genre à se laisser abattre, il a une âme de guerrier, le voilà déjà en train d’examiner fébrilement tous les recoins du panier en quête de la pierre creuse qu’il pourra casser pour creuser un tunnel. A côté des autres reclus de la miaulade, Chat ressemble à Clint Eastwood à Alcatraz. Il n’a pas ses deux pattes dans le même panier, mon choupinou, me dis-je avec ce qui ressemble bien à de la fierté maternelle et mélangeant deux expressions d’un coup. Fierté calmée d’un coup par l’arrivée du vétérinaire prononçant le nom de mon chat – absolument ridicule et inavouable – dans la salle d’attente, et m’obligeant à soulever le panier du bébé éléphanteau. Il faut savoir que physiquement, ma bestiole fait environ trois fois mon poids. « Il est beau, votre matou ! » me dit une dame admirative. Il est beau, c’est vrai, dans un genre lévrier élancé. Je suis moyennement douée en porter de lévrier, je titube donc jusqu’au cabinet du vétérinaire comme une ivrogne sur patins à roulettes.

Je me rappelle, maintenant, pourquoi je ne prévois jamais rien le soir qui suit une consultation chez le vétérinaire. Ce n’est pas tant le caractère relativement amorphe du chat post-vaccin, c'est plutôt ma sensation d’être passée par mégarde dans le tambour d’une machine à laver alors qu’elle était en plein essorage.

 

Dessin (c) Monsieur Bruno Issaly, comme toujours! Tous Droits Réservés

 

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Commentaires
T
Ok... je suppose qu'il est croisé, ou alors né sous le signe du chien...dans ce cas je m' abstiendrai de toute réflexion désagréable le concernant désormais :)
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C
Oui c'est sûr; c'est égoïste, mais il assume, le chat, son égoïsme, c'est ça toute la splendeur du truc! Ceci étant, je tiens à préciser que mon chat est un chien déguisé en matou, il me regarde comme si j'étais le dieu Râ en personne (Râ, pas rat), me suit comme.... un petit chien à travers la maison, et reste prostré sans manger quand je ne suis pas là. Si.
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T
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt ton post plein d'humour comme d'habitude. Mais je vais me faire assassiner par tous les amoureux des chats à la fin de mon commentaire.<br /> <br /> Je n'ai jamais pu supporter cet animal dont l'amour immodéré qu'il porte à sa maison à son coin et ses repères est plus fort, quoi qu'en pensent les propriétaires de chats , à son maître. Un chat c'est égoïste.<br /> <br /> Et voilà que je vais me lancer et si vous ne me faites pas taire je serais intarissable sur le sujet du chien.<br /> <br /> Qui veut un ami , un vrai , fidèle jusqu'à la mort, élève un chien.<br /> <br /> Bien dressé, il est affectueux, obéissant, partageant avec son maître la joie, la tristesse , la détresse, ignorant dans ces moments sorties et repas. Un chien est un ami attentif. Le regard d'un chien fidèle est une preuve d'amour sans concession. ♥
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