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La vie dans mon quartier de lune
2 décembre 2011

Réveil

Je suis avec Lui, le bonheur est simple et fluide, l’absolu existe à travers Lui, sa présence me semble évidente, je ne doute de rien, moi qui questionne tout, l’évidence me regarde en face, et puis cette force qui me happe, et puis ces bras qui me tirent en arrière, qui me traînent, les bras du Réveil, une transition courte et douloureuse aussi sèche qu’une porte qui claque et je sors groggy de mon rêve. En une fraction de seconde, le monde réel me gifle, les brumes du sommeil m’engourdissent encore et m’empêchent de faire feu en retour, debout mais chancelante, exposée au milieu de la réalité crue, cible parfaite et les yeux encore aveugles de mon rêve, je ne comprends plus rien. La cruauté du réveil me frappe sans que j’identifie la source de l’attaque, l’agression me transperce, je suis touchée et je ne riposte pas. Et soudain la lucidité me foudroie, la vue me revient en même temps que la mémoire : je sors des bras d’une personne et je me rappelle que cette personne ne veut pas me voir, qu’elle a même refusé de me rencontrer, et le retour à la réalité me gèle. La réalité de mon rêve me paraissait tellement plus douce, cette projection de lui que je berçais comme mon propre enfant, et que j’ai du laisser derrière moi, comment l’homme réel peut-il être aussi dur ? Ai-je bien rêvé de Lui ?

Le corps physique rattrapé par l’insoutenable lourdeur de l’être, mais l’esprit s’échappant plus haut, rejoignant les nuages dans lesquels Il m’attend, dans lesquels il me tenait encore quelques secondes avant que je ne me réveille. Prisonnière de ma réalité mais gardant la mémoire de ses gestes et de mes sensations comme si je les avais plus vécus que ma propre vie, m’enfonçant les poings sur mes yeux pour retenir son souffle, pour emprisonner ces dernières minutes fugaces qui m’échappent déjà, j’aimerais les saisir dans un flacon que je pourrais ouvrir plus tard, oublier ces dernières secondes c’est tuer ces heures aériennes où le bonheur me semblait réel, à ma portée, je refuse de céder, je refuse d’ouvrir le poing au creux duquel j’ai enfermé mon souvenir.

Marquée par mon rêve, je vais le garder avec moi une partie de la journée comme un brouillard autour de moi qui ne me quittera que progressivement. Il me faudra plonger par paliers successifs dans la réalité de ma journée pour que l’impression laissée par mon rêve s’estompe, qu’elle s’évapore complètement, que j’oublie l’homme qu’il aurait pu être et que je me convaincs de l’homme qu’il est. Il va me falloir fermer les yeux et retenir ma respiration, verrouiller ma mémoire pour franchir ces paliers sous-marins, et peut-être que ce soir en me couchant, j’aurai oublié qu’il a été mien l’espace d’une nuit.

 

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