Dimanche soir

J’ai pris pour habitude d’écouter TSF, la radio jazz, depuis quelques temps. Un signe que je vieillis, sans doute. Mes années Lovin’ Fun sont bel et bien derrière moi (le simple fait de pouvoir se souvenir de cette émission trahit mon âge, je crois). Le jazz accompagne parfaitement mes dimanches soirs. Mon blues du dimanche soir. Dans le fond, le lundi matin n’est pas plus redoutable que son aïeul le dimanche soir. La semaine qui s’annonce en pointillés ne s’affirme pas encore, j’ignore quel crayon viendra relier les points entre eux avec bonheur ou déception. Apollinaire écrivait que « rien n’est mort que ce qui n’existe pas encore. Près du passé luisant, demain est incolore », ce gars-là n’aurait pas du mourir de la grippe espagnole, avec des mots pareils.

Ma semaine se déroule comme un tapis rouge que le personnel discret prépare pour la venue de la star. Le jazz me paraît tout indiqué pour l’attendre sereinement. Il me parle d’appartements new-yorkais, de lumière chaude tombant des abats-jour, de chat endormi sur un fauteuil et de livres en pagaille, en piles et en désordre à travers la pièce. Je n’ai certes pas New York, mais j’ai l’abat-jour et le chat endormi (lui et moi sommes en complet décalage horaire : je dors le dimanche matin, il dort le dimanche soir). Et pour tout verre de sherry posé sur le guéridon à côté de moi, une bulle de tendresse pour les amis qui ont relayé ce blog toute la journée comme un Téléthon infini et ont attisé la curiosité de suffisamment de gens pour que mes mots se façonnent en petite fenêtre ouverte sur le monde, votre monde. J’ai connu des dimanches soirs pires que celui-ci.